AGASA : un désaccord qui expose une fracture plus profonde selon Jocelyn Louis Ngoma 

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L’affaire qui secoue aujourd’hui l’Agence Gabonaise de Sécurité Alimentaire (AGASA) dépasse largement le cadre d’un simple malentendu hiérarchique. En désavouant publiquement son Directeur Général Adjoint pour une action perçue comme salutaire par l’opinion nationale, notamment, la fermeture de sites clandestins de fabrication d’eau en sachet dans des conditions d’insalubrité indescriptible, le Directeur Général a déclenché une onde de choc dans l’esprit collectif.

Dans un contexte où le pays tout entier cherche à se reconstruire autour de nouveaux repères moraux, cette querelle au sommet d’un organisme public crée une regrettable confusion. Car elle oppose, non pas des positions techniques ou juridiques, mais des perceptions de l’autorité, du devoir et de l’éthique. Le signal envoyé à la population est inquiétant : doit-on privilégier le respect rigide des procédures au détriment de la protection immédiate des citoyens ?
Ou, au contraire, saluer l’initiative dès lors qu’elle répond à une urgence nationale ?

Car il faut le dire sans détour, cette urgence nationale, c’est de l’assistance à peuple en danger. Laisser prospérer des usines clandestines produisant des biens de consommation douteux, dans l’indifférence ou la lenteur administrative, reviendrait à trahir la mission fondamentale de l’État.

Mais Il faut tout de même souligner que le DGA, n’est pas un acteur neutre. Son passage remarqué, et controversé, au ministère des Transports, notamment à la direction de l’établissement des permis de conduire, l’avait déjà placé au cœur de plusieurs critiques internes. Accusé d’indiscipline, et perçu comme protégé par sa filiation avec un ancien ministre influent de l’ordre ancien, son comportement passé a parfois été jugé incompatible avec les exigences de loyauté et de rigueur qu’impose la haute administration. Cette réputation d’« électron libre » peut expliquer, en partie, l’agacement du Directeur Général de l’AGASA.

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Mais fallait-il pour autant porter ce désaccord sur la place publique ? Le Directeur Général, par son parcours et ses qualités intellectuelles, aurait pu, et dû, maîtriser cette situation avec hauteur et discernement. Le devoir de réserve, la gestion interne des différends et le respect des prérogatives sont les piliers d’une gouvernance stable. En s’exprimant dans les médias pour désavouer son adjoint, il a affaibli son autorité autant que celle de l’institution qu’il incarne.

Pire encore, ce type de réaction nourrit les dilemmes moraux déjà ancrés dans notre société : que devient l’intérêt général lorsque les querelles personnelles, les soupçons d’ego ou les rivalités héritées interfèrent avec l’action publique ?
Comment construire une République éthique si ceux qui la dirigent rejouent les logiques de l’ancien ordre ?

La Cinquième République, voulue comme une ère de rupture, exige davantage : discipline, clarté, loyauté et exemplarité. Elle réclame des institutions cohérentes et responsables, capables d’agir dans la discrétion lorsque les tensions surgissent, et de parler d’une seule voix quand il s’agit de protéger la population. Dans cette affaire, chacun aurait dû faire preuve de retenue et de sens du devoir.

Le peuple gabonais attend des actes forts. Il ne s’agit pas seulement de sanctionner la contrefaçon ou les pratiques sanitaires douteuses, mais de rétablir une éthique administrative qui réconcilie efficacité, moralité et autorité.

Jocelyn Louis NGOMA
Secrétaire Général de la FETRAG

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